« De St Vincent au Pape François : modernité de la charité de proximité »

par | Mar 8, 2017 | 400 ans du charisme vincentien, Actualités, Association Internationale des Charites | 0 commentaires

Vers 19h, alors que les étudiants quittaient le Centre Sèvres, les équipières, des Filles de la charité et quelques pères lazaristes se pressaient en direction de l’auditorium où  quelques équipières faisaient l’accueil.

A 19h15 prenaient place à la table ronde que la Fédération des Equipes Saint Vincent  a organisé pour ouvrir les festivités de 400 ans, le P. PETICLERC s.d.b., spécialiste de l’éducation jeunesse en milieu défavorisé, Mme GUILLAUME, auteure de la dernière biographie de St Vincent de Paul, le P. GRIEUX s.j. , théologien de la charité, et M. REBECHE, diacre permanent, animateur de la diaconie dans le diocèse du Varprenaient. Tandis qu’équipières, filles de la charité – parmi lesquelles la soeur Kathleen APPLER, supérieure générale -, des pères lazaristes, le président de la Société Saint Vincent de Paul, celui de Depaul France et de multiples équipières de toute la France emplissaient la salle en présence de leur présidente internationale.

C’est Mme de PRECOURT, chargée de mission 400 ans, qui ouvre ce moment des festivités. Elle nous rappelle que notre présence  ici pour une table ronde dénommée « De Saint Vincent au pape François : enjeux et modernité de la charité de proximité », veut faire mémoire qu’il y a 400 ans Monsieur Vincent eut l’intuition de la charité de proximité que des dames ont su mettre en œuvre avec cœur et rigueur. Elle plante plusieurs axes qui caractérisent cette fondation vincentienne : ne pas séparer spirituel / temporel, veiller à ce que les accueillis se prennent en charge, que la joie soit le mode habituel de communication et que le bien fait soit fait avec attention et compétence. Elle note que si les époques sont différentes, la charité de proximité continue d’être un outil adapté à notre temps en même temps qu’un moyen de faire échec aux communautarismes. C’est cette dynamique qui regroupe aujourd’hui 153.000 volontaires dans 53 pays.

C’est au tour de Mme Laurence COSSḖ de présenter les quatre témoins qui vont mettre en route cet échange. Le P. PETITCLERC ouvre les feux en rappelant que l’échange avec le frère ne peut qu’être du côté de l’amour-parole de l’autre pour entrer en charité.

C’est M. REBECHE qui cite un proverbe berbère qui dit que « l’autre au loin est perçu comme un ‘fauve’, lorsqu’il se rapproche il est  vu comme un ‘autre’ et à côté accueilli comme un ‘pauvre’, et nous invite à passer de la philanthropie à la philadelphie des droits de l’homme aux droits du frère.

C’est l’histoire qui va approfondir cette entrée en matière : Mme GUILLAUME nous rappelle que Vincent avait l’art pour toute personne d’aller à l’essentiel pour parler à son âme autant qu’à son corps. C’est pour cela que le Vincentien prendra soin de l’âme et du corps. Et la charité qu’il fonde, si elle se met au service des plus pauvres, aura soin de vivre cette charité en équipe par la prière et la correction fraternelle. Il saura mettre en route des femmes dont il discerne la rigueur, le désintéressement, le dévouement et l’imagination créatrice. Il va promouvoir la responsabilité du pauvre (luttant ainsi contre l’assistanat).

Le P. GRIEUX nous parle de la vision du Pape François en insistant sur sa perception d’une Eglise en sortie, « hôpital de campagne »  – donc aussi en déplacement – comme centre de son être. Lorsque Jésus fonde son cercle de disciples, c’est pour être entouré de possédés et de malades qui en deviennent le cœur.  Ses premiers gestes (Lampedusa, Lesbos) en sont le signe. Nous sommes invités à répondre à la logique de compétition par la logique d’alliance. La charité n’est pas conséquence de la foi, elle est au cœur de l’expérience du croyant. C’est la vie avec Dieu donc l’alliance qui introduit la charité. Ce n’est pas une relation contractuelle, c’est une relation de pairs. Cela entraîne une réponse dont la loi va baliser le chemin pour aider à mieux produire la relation de charité.

Le P. PETITCLERC continue en distinguant trois ordres de charité qu’il faut articuler en permanence : la charité de proximité (secours d’urgence), la charité institutionnelle (les organismes) et la charité politique (qui pense à la répartition des biens). Il nous demande de savoir attirer l’attention des politiques sur la destination des richesses produites afin qu’elles servent au bien commun. Il insiste sur le fait que seuls les moyens économiques ne suffiront pas mais qu’il nous faut aider à la création de liens renouvelés entre riches et pauvres.

M. REBECHE nous rappelle que c’est Benoît XVI qui, par son encyclique Deus Caritas est, va insister sur l’organisation collective du soin des plus fragiles. En parlant du soin, il centre moins sur l’aspect technique de l’aide que sur l’aspect relationnel. Si nous regardons l’autre (approche spirituelle), ce n’est pas le pauvre (regard technique) avec qui nous entrons en relation mais il s’agit de tisser du lien. Souvenons-nous qu’à l’eucharistie, l’hostie a à voir avec le mot « hospitalité », même origine qu’  « hostilité ». Nous sommes invités à passer de l’hostilité à hospitalité. Se faisant l’écho du P. de Chergé, moine de Thibbirine, nous pouvons aussi redire que la charité trouve son sommet en Dieu lorsque le verbe se fait chair.

Le P. PETITCLERC, en écho, nous rappelle que dire « Dieu est père » entraîne que nous allons vivre en « frères », mais les frères, on ne les choisi pas… Il nous dit que dans notre devise républicaine, « liberté » et « égalité » sont de l’ordre du droit, alors que la « fraternité » est de l’ordre du devoir. Cependant pour le chrétien, la fraternité est une grâce. Il ne s’agit pas seulement de ‘vivre’ ensemble (risquant d’aboutir à une cohabitation de tribus) mais de ‘faire’ ensemble.

L’échange s’ouvre par un sourire invitant une éthique de vie pour les politiques, les invitant à avoir un ancrage dans le réel de la pauvreté pour rester concret dans leur gestion des affaires de la cité.

Puis il est rappelé que si nous souhaitons tenir une juste place pour aider les pauvres à retrouver leur insertion sociale, il ne faut pas oublier qu’au-delà des épreuves qualifiantes – stages, sessions – ce qui compte, c’est le tissu relationnel qui est source d’énergie et bien souvent unique voie de recréation.

Une question aborde la relation bénévoles/salariés dans les actions auprès des pauvres : tous insistent sur le fait que ce sont deux approches nécessaires qui n’ont pas la même fonction et qu’il faut veiller à faire contribuer au mieux-être des personnes accompagnées, évitant de fonctionner en concurrence (l’autre en situation de pauvreté se retrouve acteur de son existence).

A la question de la formation technique que peut exiger la mission de service, il est rappelé que doit toujours être mis au premier plan la gratuité de la relation qui sera le véritable espace de recréation de la personne qui de ‘quémandeur’ devient ‘acteur’ de partage.

Ce beau moment s’achève en se rappelant quelques intuitions qui vont guider tous : nous réentendrons la créativité qu’a déployée M. Vincent pour que chacun donne le meilleur au projet. Nous n’oublierons pas que les pauvres nous enseignent les chemins pour passer de l’hostilité à l’hospitalité. Et vivant en logique d’Alliance, nous conjuguerons avec adresse ‘amour et loi’ pour que tous retrouvent leur sourire. Nous saurons poser les gestes justes qui aideront tous à retrouver leur confiance, certains que nous ne sommes que des ‘pierres de gué’, sachant établir des proximités qui permettront à celles et ceux qui traversent des temps de souffrance de retrouver force pour continuer leur route.

P. Bernard Massarini c.m.

Tags: famvin400

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