« Mr Vincent quand l’histoire prend saveur d’Évangile »
Ce samedi 25 mars, sous des trombes d’eau, vers 9h les sièges de la grande salle de l’I.C.M. se remplissaient de chauds échanges entre les vincentiens tout en eau, en ce jour de forte intempéries : membres des Equipes Saint Vincent qui fêtent leur 400 ans de création, membres de la Société Saint Vincent de Paul, et quelques autres, venus de divers lieux –y compris Avignon- passionnés de Saint Vincent.
C’est le P. de Charentenay s.j., directeur de L’IFO (Institut Frédéric Ozanam) qui ouvre la rencontre nous invitant à entrer dans cette journée organisée pour redécouvrir Saint Vincent, cet homme incroyablement moderne qui a su créer au XVIIème un service de charité innovant source d’inspiration dans nos activités. Puis Mr Martre, président de la SSVP des Bouches-du-Rhône, maitre-d ‘œuvre de la journée, remercie les intervenants puis salue en cette année des 400 ans du charisme vincentien, les prêtres de la mission les filles de la charité, les équipières et les conférences qui continuent à faire vivre cet héritage dans la cité phocéenne, tentent de faire que l’amour affectif devienne amour effectif, honorant la mémoire de Mr Vincent prêtre gascon qui deviendra le ministre des affaires sociales du royaume.
C’est Me GUILAUME la dernière biographe nous invite à redécouvrir Mr Vincent gestionnaire de la charité. Elle nous présente ce gascon fils d’agriculteur qui va progressivement vivre la découverte du service des plus fragiles faisant ressortir ses principes de charité (confiance en la providence, l’attachement aux besoins matériels et spirituels sans les séparer, un équilibre entre souffle spirituel et organisation juridique), son don d’organisation (modelé sur la façon dont Dieu crée et préserve la création, une saine gestion et un sens de la mobilisation de a générosité), une grande aptitude à la gestion (veiller à doter les créations de ressources, centré sur les pauvretés du rural sans omettre celles des villes, gérer administration et sens de la proximité ), transmission du charisme aux femmes (leur remettant la direction des diverses fondations). Cette personnalité charismatique garde un grand respect de la personne (refusant de prendre en charge des pauvres enfermés dans l’hôpital général) et refusant l’assistanat (notamment dans la fondation de l’hospice du saint Nom de Jésus où les personnes âgées continuaient à partager leurs compétences à l’intérieur de l’établissement).
Après quelques questions, nous prenons une courte pause avant que le P PITAUD ne nous fasse entrer dans la belle relation entre Mr Olier et Mr Vincent(1). Curé de saint Sulpice de 1642 à 1652 tout en animant le séminaire de 1642 jusqu’à sa mort en 1657. De 27 ans le cadet de Mr Vincent il est issu d’une famille de robe. Converti au sanctuaire de Lorette en 1628 il va se mettre sous la direction de Mr Vincent. Il se met au service de l’archevêque qui le met à prêcher les retraites aux ordinands. (Mr Bourdoise curé de st Nicolas du-Chardonnet à Paris fait aussi de même). Quand Vincent crée les exercices aux ordinands à saint-Lazare, il confie des sessions à l’abbé Jean-Jacques Olier. Lorsqu’il part prêcher une mission dans les terres de ‘abbaye dont il était commanditaire et avait confié à Alain de Solminihiac, ne parvenant pas à la réformer, Mr Vincent va lui confier Mr Portail et d’autres frères pour l’accompagner. Vincent le voyait évêque et a dû intervenir en ce sens.
En 1635, Jean-Jacques Olier prend Charles de Gondren, successeur de Berulle, qui avait aussi pris la direction d’une communauté chargé de la formation des prêtres, comme directeur spirituel. Mr Gondren meurt en 1641 ayant à peine révélé son désir de fonder un séminaire. Ce changement n’avait pas affecté la relation entre Mr Vincent et Mr Olier qu’il assistera lors de sa mort, le lundi de Pâques 1657. Mr Vincent présidera ensuite la première assemblée après sa mort, celle où Mr Breton-Villiers devient le supérieur de la communauté et du séminaire. Il accomplira le désir de Mr Olier de conquérir le monde en faisant de saints prêtres. Nous savons par une lettre que Mr Vincent pensait le séminaire de Bérulle trop métaphysique, celui de Mr Olier trop spirituel préférant celui très concret de Bourdoise (apprentissage de pratiques et simples connaissance des comportements ).
Vient la pause repas qui regroupe une trentaine de congressistes dans un restaurant proche. A 14h30, tous reprenant place pour parcourir avec le P. Massarini c.m., l’histoire des galères à Marseille et de l’implication de Mr Vincent dans le service de cette réalité.
C’est dès 1542 lorsque Marseille est rattaché au royaume de France que des galères siègent dans un entrepôt (pas encore arsenal –lieu de construction, réparation, et entretien), la plupart privées qui progressivement deviendront propriété du Royaume pour composer une marine royale le siège de l‘arsenal voyagera entre Toulon et Marseille suivant les époques et les défis politiques retenus. Mr Vincent sera d’abord touché par le sort des galériens, condamnés auteurs de délits civils ou prisonniers lors de combats (maures, turcs et même grecs) qui étaient parqués sur Paris avant de rejoindre leurs navires. Il va louer de nouveaux bâtiments sur Paris, des 1618, améliorant leur condition de vie en adjoignant des filles de la charité pour le service et leur assurant l’enseignement religieux. Nommé aumônier général des galères en 1619, il visitera des galères en 1622 à Marseille et 1625 à Bordeaux pour faire des audits de situation.
Sensible à l’initiative de l’hôpital des galères que la duchesse d’Aiguillon contribuera à fonder, il y mettra ses missionnaires qui auront charge de veiller à l’administration religieuse et de veiller à ce que les condamnés malades soient correctement pris en charge. Suivant les périodes le nombre de membres de la chiourme (les condamnés à ramer) vont changer tant en nombre qu’en provenance sociale. Pour en avoir davantage on commuera des peines de mort en peine de galères et pour augmenter leur nombre on choisira d’associer les vagabonds et oisifs aux équipages, changeant les relations dans les équipages.
Ayant une connaissance de proximité des populations des galères le règlement des aumôniers rappellera l’exigence de veiller à la tenue des conditions de vie digne (vêtement, nourriture) ainsi que spirituel (pensant même à un accompagnement spécifique aux convertis de l’islam ou la recherche d’un moyen d’enseigner ceux d’autres religions de leurs principes)..Il ressort de cette longue période d’histoire que Mr Vincent a tenté d’humaniser ce terrible lieu de sanction du royaume pilier de la puissance militaire du royaume en veillant à conserver l’humanité fondamentale dans le traitement des personnes y compris les condamnés.
Après un court temps d’échange c’est Mr Blanc, directeur de la délégation diocésaine du Secours Catholique qui vient nous parler de la pauvreté sur Marseille aujourd’hui. Occasion pour tous de se mettre à l’écoute des visages qui composent cette population phocéenne en situation de survie dans un monde aussi dur que celui des galères. Il commence en brossant le tableau d’une ville en souffrance : rappelant que le 3ème arrondissement est la ville la plus pauvre d’UE, il rappelle que 10% de personnes sont au RSA et y demeurent plus de 3 ans, que la ville est à 25% de pauvreté alors que ce pourcentage ailleurs en France est de 14%. Les semaines sociales de Marseille et le CSA ont produit une étude qui met en évidence que 51% des habitants sont en situation pauvreté. Il rappelle que le système social trop complexe, la multiplicité des intervenants rend plus complexe la rencontre de voies de sorties de la situation de pauvreté. Il mentionne en parlant du fléau qu’est la solitude toujours plus nombreuse et prégnante. Il termine informant que dans le même temps la cité bien qu’ayant 20% de ses résidents en situation de misère elle accueille 10% des grandes fortunes françaises.
Brossé ce tableau il nous parlera de plusieurs champ d’actions dans lesquels il dit sa joie de reconnaître des visages vincentiens qui continuent les pas de leur fondateur. Il présente e service du bus de nuit auprès de 180 personnes sans-abris proposant services repas et en organisant temps de fête pour recréer du lien social. Un Accueil de jour offrant café, douche, laverie linge accord de domiciliation.. La Maison Béthanie un point santé avec docteurs bénévoles qui oriente une fois par semaine vers des médecins d’un hôpital. Le service offre aussi les prestation d’un podologue, et organise aussi des cours de français ainsi qu’un service d’aide à l’emploi.. Il parle aussi de l’activité Sortie de bidonville qui a suivi 24 familles, 5 ayant quittés. Cela ne représente qu’une centaine de personnes accompagnées (santé, insertion ou vers l’emploi)..Il évoque ensuite le travail avec les sortants de prison qui accueille deux lazaristes, il mentionne aussi le travail en lien avec la CIMADE auprès des migrants dont nombre sont déboutés du droit d’asile. Enfin un Accueils-écoute récent fait apparaître la violence vécue au quotidien par de multiples marseillais. Il termine en rappelant les quatre principes du secours Catholique : une action avec personne, une attention à la spiritualité de chacun, la libération de temps pour la relation et l’action en partenariat et en réseau localement et généralement.
La journée se clôt alors le P. de Charentenay faisant remarquer que partant de l’histoire de Saint Vincent, nous approchant de son sens de la relation et découvrant sa façon d’approcher les réalités sociales de son siècle, il a su mettre en synergie les personnes, les réseaux et les ressources. Son expérience nous a conduit à nous mettre à l’écoute du panorama de notre ville pour tenter, comme vincentiens, d’apporter de nouvelles réponses les plus ajustées possibles aux besoins de notre temps. Tous repartent heureux de leurs découvertes certains qu’ils vont continuer à écrire dans la belle et douloureuse cité phocéenne un peu de la chaleur de cette charité inventive que Mr Vincent a su faire se déployer au cœur du XVIIèùe.
Bernard Massarini c.m.
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(1) Pour le lien école de spiritualité française et Olier et les liens entre Mr Vincent et JJ Olier un très bel article du Père Robert Maloney, c.m. 2004 paru dans le bulletin de St-Sulplice.
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