Conférences de Carême du P. Lacordaire n°8
À ceux qui s’opposent à l’Église catholique
R. P. H.-D. LACORDAIRE, CONFÉRENCES DE NOTRE-DAME DE PARIS, TOME PREMIER, p. 301-302
J’en appelle à vous ; vous avez vu des catholiques, sommes-nous des hommes de doute ? D’ailleurs, de quoi s’agit-il ? Nous, catholiques, nous attestons les phénomènes qui se passent en nous ; vous êtes les maîtres de ne pas nous croire, de manquer d’oreille et de discernement. Je ne veux pas et je ne puis pas vous contraindre ; mais, je vous le répète, nous n’avons pas de doute, et nous le prouvons par notre conduite durant la vie et à l’heure de la mort. Voyez-vous ce peuple entendant d’un côté la parole de l’Église, qui affirme, et, de l’autre, votre parole, qui nie ; le voyez-vous hésiter ? L’enfant qui fait sa première communion est-il troublé par la crainte de se tromper ? Vous remuez le ciel et la terre contre des enfants, des paysans, des soldats, des femmes ; armés de pied en cap, chevaliers de l’erreur, vous montez à cheval, bardés et caparaçonnés^ et vous descendez dans la lice contre la vile plèbe de l’humanité: le peuple chrétien vous écoute-t-il ? Il passe son chemin, il va à l’éternité sans vous regarder, sans vous entendre.
Est-ce là le doute ? ou bien une certitude illettrée et translumineuse ? Car, si c’était une certitude lumineuse seulement, ce pauvre ouvrier, cet enfant, cette fille pourraient vous répondre, et ils ne vous répondent rien.
Vous leur faites de la métaphysique et de l’histoire, vous leur dites : Mais c’est l’Église qui t’a fail serf, tu es souverain naturellement ; c’est l’Église qui t’a fait pauvre, tu es riche naturellement ; ta faim, c’est l’Église ; ta soif, c’est l’Église; ta chemise trouée, c’est l’Église ; ton lit délabré, c’est l’Église ; ta femme qui se meurt, c’est l’Église ; toutes tes souffrances, c’est l’Église ; et tu ne vois pas cela ? Si du moins vous vous adressiez à moi, ma parole pourrait se mesurer avec la vôtre ; mais ce peuple, que voulez-vous qu’il vous réponde, s’il n’avait que sa science et sa raison ? Heureusement, et grâce à Dieu, il a une lumière divine devant laquelle la vôtre n’est rien ; il éprouve devant vous ce que l’on sent, quand on voit, devant le soleil, l’aveugle qui le blasphème. Nous voyons le soleil de la vérité éternelle, et vos paroles contre lui, nous ne les entendons même pas ; elles sont comme le sifflement du pâtre à côté de l’Océan.
Jean-Baptiste-Henri-Dominique Lacordaire (1802-1861) était un prédicateur renommé et restaurateur de l’Ordre des Prêcheurs (les Dominicains) en France. Il était un grand ami de Frédéric Ozanam (en fait, il est l’auteur d’une biographie très intéressante sur Ozanam) et très proche de la Société de Saint-Vincent-de-Paul.
Image : Lacordaire, peint par Louis Janmot (1814-1892), ami de Frédéric Ozanam et l’un des premiers membres de la Société de Saint-Vincent de Paul.
*Source: R. P. H.-D. LACORDAIRE CONFÉRENCES DE NOTRE-DAME DE PARIS. TOME PREMIER. Auteur : Jean Baptiste Henri Dominique Lacordaire. Publié en 1853
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