Ce n’est pas le plaisir qui est le fondement de la société, c’est la vertu
Conférences de Notre-dame de Paris, du Père Lacordaire, TOME DEUXIÈME, p. 404-406
Aujourd’hui … que le besoin de l’association se manifeste de toutes parts, et qu’après avoir détruit l’association chrétienne, on en veut reconstruire une autre sur des bases de pure raison, que voyons-nous ? Nous voyons, entre autres efforts curieux, des hommes se consumer en rêves subtils et les plus ingénieux du monde pour substituer dans l’association la loi du plaisir à la loi du dévouement. … quel homme de cœur pourrait se passer d’efforts et de vertu ? … Ce n’est pas le plaisir qui est le fondement de la société, c’est la vertu ; ce n’est pas la jouissance qui est notre vocation ici-bas « c’est le travail et la douleur. Dieu nous a créés tout exprès pour produire par nous une chose qu’il ne peut pas produire tout seul, c’est-à-dire la grandeur dans la bassesse, la force dans l’infirmité, la pureté dans la chair et le sang, l’amour dans l‘égoïsme, le bien dans le mal, la vertu dans un cœur qui avait, à chaque minute, la liberté d’être un scélérat. Voilà notre vocation, notre destinée. Jésus-Christ n’a conquis le monde que parce qu’il la connaissait, et que, du haut de sa croix, esclave et Dieu, il l’a souverainement remplie. Le salut est à sa suite, et toute gloire et tout bonheur aussi. C’est pourquoi, grâce à Dieu, le plaisir et le goût ne fonderont jamais ici-bas une société ; le malheur sera le plus fort, afin que la vertu le soit ; il y aura des pauvres, précisément pour que l’aumône se fasse ; des plaies, précisément pour qu’elles soient pansées ; des larmes, précisément pour qu’on les accepte ; des renversemens, pour qu’on aspire à la stabilité ; des ruines, pour que l’orgueil s’humilie ; des misères publiques, pour qu’il y ait des services gratuits et populaires ; du sang, pour qu’il y ait des saints.
Jean-Baptiste-Henri-Dominique Lacordaire (1802-1861) était un prédicateur renommé et restaurateur de l’Ordre des Prêcheurs (les Dominicains) en France. Il était un grand ami de Frédéric Ozanam (en fait, il est l’auteur d’une biographie très intéressante sur Ozanam) et très proche de la Société de Saint-Vincent-de-Paul.
Image : Lacordaire, peint par Louis Janmot (1814-1892), ami de Frédéric Ozanam et l’un des premiers membres de la Société de Saint-Vincent de Paul.
*Source: R. P. H.-D. LACORDAIRE CONFÉRENCES DE NOTRE-DAME DE PARIS. TOME DEUXIÈME. Auteur : Jean Baptiste Henri Dominique Lacordaire.
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