À la veille de la fête de saint François d’Assise, le 4 octobre 2020, le Pape François a publié sa troisième encyclique : ‘Fratelli tutti‘.
En tant que responsable au sein d’une congrégation internationale qui remplit une mission claire dans le monde, plus particulièrement dans le monde de l’éducation et de la santé, sur la base de son propre charisme, le Fr. René Stockman propose ici un bref résumé de chaque chapitre, suivi d’une réflexion plus personnelle.
Chapitre 4 : Un cœur ouvert au monde
Dans ce chapitre, nous examinons et approfondissons un problème très actuel et la manière dont nous pouvons le traiter d’une manière évangéliquement responsable.
Le problème de la migration, qui est discuté en détail ici, est bien entendu un événement complexe pour lequel il n’existe pas de solutions toutes faites. L’idéal reste d’éviter les migrations inutiles en créant autant que possible la possibilité de vivre localement dans la sécurité et la dignité. Mais en même temps, chacun a le droit de chercher un endroit pour lui-même et sa famille où il peut se développer intégralement en tant que personne. Pour les migrants, quatre verbes devraient toujours venir en premier: accueillir, protéger, apprécier et intégrer. Cela peut se concrétiser, entre autres, en facilitant l’obtention de visas, en développant des couloirs humanitaires pour les réfugiés qui se trouvent réellement en situation d’urgence, en fournissant un logement convenable et le soutien social nécessaire, avec le droit à l’intégration dans le système éducatif et la garantie de la liberté religieuse. Lorsque les migrants reçoivent la citoyenneté, cela doit être sur la base de la pleine égalité avec les autres citoyens du pays. Pour réaliser tout cela, une coopération est nécessaire entre les différentes agences du pays impliquées dans l’accueil des réfugiés et des migrants.
L’arrivée de personnes de cultures différentes ne doit pas être immédiatement perçue comme une menace, mais plutôt comme un enrichissement mutuel. N’oublions pas combien de pays ont pris forme grâce aux migrations intercontinentales, il suffit de penser à l’ensemble du continent américain aujourd’hui, par exemple. Ainsi il est vraiment nécessaire que des efforts positifs soient faits pour parvenir à un rapprochement plus harmonieux entre l’Est et l’Ouest, en tenant compte et en respectant les différences culturelles, historiques et religieuses. C’est pourquoi il y a une fois de plus un plaidoyer en faveur d’un nouvel ordre mondial juridique, politique et économique qui puisse promouvoir et gérer précisément ces nouveaux problèmes au niveau mondial. Il est important ici, qu’il y ait de la place pour que les plus pauvres puissent aussi faire entendre leur voix et participer à la prise de décision. Trop souvent des décisions sont prises à leur sujet sans aucune forme de participation de leur part. L’aspect du gratuit doit également continuer à jouer un rôle d’attitude de base: quand les gens frappent à notre porte, et cela vaut également dans le domaine de la communauté au sens large, nous ne devons pas immédiatement nous demander quels bénéfices ils nous apportent. Le critère doit rester que nous continuons à voir tout le monde comme faisant partie de la grande famille humaine, et ne pas rester coincés sur les différences qui existent. Les pôles de « mondialisation » et de « localisation » seront toujours présents et ne peuvent être simplement supprimés ou niés, mais nous devons nous assurer qu’ils soient ramenés à un équilibre viable. La mondialisation ne doit pas nécessairement entraver le respect et la croissance du local, mais elle peut aussi l’enrichir. Je vais vers l’autre depuis mes propres origines, ce que je n’ai pas besoin de nier, mais en même temps je suis ouvert aux propres origines de l’autre. Grandir vers une plus grande universalité ne signifie pas tout normaliser et nier notre propre histoire et nos propres racines. Non, nous ne devons pas construire une tour de Babel, car ce n’est qu’une expression d’orgueil et d’ambitions injustes. Il s’agit d’agir sur place au niveau local, mais toujours avec l’ouverture à une perspective plus large. S’isoler de cela est le pôle de croissance d’un nationalisme malsain et de populisme qui, malheureusement, émerge de plus en plus. Toute culture doit être ouverte aux valeurs universelles. L’amour pour son propre pays ne contredit pas l’ouverture et l’intégration chaleureuses d’une humanité plus globale. Voyons l’ensemble de la communauté humaine comme une grande famille, et dans chaque famille il y a aussi de nombreuses différences internes, mais donc pas insurmontables.
Le thème de la migration ne peut laisser personne indifférent aujourd’hui et il revient encore une fois à voir ce que nous-mêmes en tant qu’individus et en tant que petite communauté pouvons faire pour développer cette plus grande ouverture et cette attitude positive envers les migrants. Nous sommes confrontés à des migrants dans les domaines des soins et de l’enseignement et cela nécessitera notre attention particulière pour les aider à s’intégrer pleinement, afin qu’ils se sentent également chez eux dans nos soins et notre enseignement et qu’ils ne soient pas considérés comme des citoyens de seconde zone. Au sein même de la Congrégation, l’internationalisation se développe très fortement, et là aussi nous sommes invités à l’apprécier de manière positive et à vraiment en profiter. N’est-ce pas un enrichissement de notre charisme que cela puisse maintenant prendre forme dans tant de cultures différentes et continuer à grandir? La vie dans les communautés internationales est un défi, mais surtout un don et un enrichissement mutuel, à condition que le respect mutuel prévale et qu’aucune supériorité de l’un ou de l’autre ne commence à régner. De nombreux frères missionnaires ont déjà vécu la vie dans une culture complètement différente comme un véritable enrichissement personnel, en découvrant de nouvelles valeurs qui étaient largement négligées dans d’autres parties du monde. En même temps, ils ont pu partager leur propre culture avec les autres et les enrichir. Sommes-nous maintenant suffisamment et volontairement ouverts à l’autre direction, lorsque des frères du sud ou de l’est vivent dans les régions du nord et contribuent à façonner le charisme? Le sentiment de supériorité reste un défaut dangereux qui doit être combattu à tout moment.
Fr. René Stockman,
Supérieur général des Frères de la Charité.
Source: Site des Frères de la Charité.
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